mercredi 10 avril 2013

Le respect en entreprise : Europe / Chine

A propos de l'entreprise "respectueuse", l m'est apparu une pluralité d'interprétations de "ce qui fait respect".

La dominante est que l'individu n'est pas respecté en tant que personne en tant que "puissance autonome".

Le plus souvent, une personne sera respectée en tant qu'elle se caractérise par un attribut de l'entreprise qui lui donne un emploi : la tradition, la puissance, l'innovation, la traversée des tempêtes économiques.. A travers la personne, c'est l'entreprise qui est respectée. Ou l'école d'origine.

Au sein d'une entreprise ou d'une organisation, il y a un phénomène semblable. La personne est respectée en tant qu'elle développe "en acte" la puissance virtuelle d'un manager, d'une expertise, d'un métier.

Donc, le "niveau de respect" reconnu à une personne par une organisation revient à mesurer un niveau d'adéquation entre la puissance virtuelle et l'acte.

Au moment d'un recrutement, la personne n'est pas reconnue dans ses qualités propres, "en autonomie". Le recruteur privilégie la capacité à être conforme à la nature du respect spécifique à l'entreprise.

Avec le résultat - très récent - des négociations patronat / syndicats donnant un droit à la formation tout au long de la vie, je fais l'hypothèse d'une mutation de la notion de "respect". L'individu est reconnu comme porteur d'un projet de développement spécifique.

La question qui se pose alors serait : "à quelles conditions un projet personnel de développement professionnel est respecté ?". Nous entrons dans une confrontation de ce qui "fait respect", donc dans une dynamique dialectique.

Je suis de très près les résultats des négociations. Je mets en scène des situations de confrontation entre le respect demandé par une entreprise, un manager, un métier et le respect qu'un salarié ou un individu demande envers son projet.

la dimension du "respect dans l'entreprise" est particulièrement éclairée par la façon dont l'entreprise moderne chinoise ou asiatique réactive les anciennes conceptions du respect dans la culture féodale chinoise.

En Asie, il ne s'agit pas de respecter un individu - le paysan, le salarié maintenant - mais de respecter une relation déséquilibrée où l'un est le Père, le Maître, le Seigneur, et l'autre le Fils, le Serviteur, le Féal.

Par exemple, quand une équipe de salariés est emmenée à une beuverie toute la nuit par un patron sud-coréen, le respect est obtenu tant pour chaque membre de l'équipe que pour le patron, par la "réussite de la beuverie". On retrouve ici les analyses de Mauss sur le don et le contre don. Le patron dissipe de l'argent, le salarié détruit sa santé et sa vie familiale.

Sur votre blog, vous vous interrogez sur la capacité du management à être une science. Il me semble que le management est un ensemble de techniques relationnelles qui visent à assujettir des individus pour les faire travailler de façon intensive. Donc le management a besoin de relations déséquilibrées, où le "don du salarié" est sans cesse à renouveler. Dans un contrat commercial classique, il y a une égalité de l'échange. Dans la relation manager-managé, le managé reste toujours en dette d'un "plus à donner".

Personnellement, le fonctionnement des relations de respect en Chine m'a permis de mieux comprendre les relations managériales que j'ai connues en France.

Je signale cette étude sociologique passionnante sur les ouvrières chinoises dans la Zone de Shenzhen.
http://www.decitre.fr/livres/made-in-china-9782815905794.html

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